Tu ne devrais pas être au match ?

Jay &' Maëlle

Ce soir n'est pas un soir comme tout les autres, c'est un soir de match. Autrement dit le bon moment pour la plupart des personnes invisibles de ce lycée de peindre leur visage au couleurs de l'équipe en priant pour que ceux-ci ne les martyrise pas à la fin du week-end. Pour d'autres, c'est l'occasion de supporter leurs équipes ou de jouer un sport qu'ils aiment, enfin la plupart. Et puis, il y a les autres, comme moi qui se servent de ce match comme une excuse. Je suis l'une des photographes du club de journalisme, et qui plus est, la soeur d'une cheerleader alors d'après beaucoup de monde la plus adapté pour parler avec les sportifs, autrement dit je me tape les photos de tout les matchs. Mais ce soir, j'avais un autre projet en tête, terminée le montage photo sur l'un des évènements de la semaine dernière et une fois de plus, je voulais le finir au plus vite. J'aime mettre tout mon coeur et me mettre à fond dans ce que je fais. Alors j'ai laisser le temps d'une soirée, la place de photographe du match à un autre et j'ai monopolisé une salle de classe. Je sais que tout le monde est au match, j'ai déjà fait cela quelques fois et personne ne m'a jamais surprise. Je reste quelques heures et je repars, tout le monde est content. En arrivant dans la salle, j'allume la petite lampe sur le bureau avant d'y étaler mes photos. Je commence alors naturellement à les ranger tout en fredonnant doucement le dernier tube des Cranberry.

Tu ignores le vide devant toi, les vertiges et la peur tu connais pas... Seule au milieu des loups, tu t'enfonces au bord des précipices. Dans la cité perdue, au travers de la nuit, toi tu vas bien. En travers la douleur et la mélancolie, tout ira bien. 'Maëlle & Jay
   
   

Soir du match. Signifie une semaine chargée. Ça se sent et moi-même, je le sens. Une semaine où tout le monde semble ne penser qu’à cela. Les joueurs, les cheerleaders, les partisans mais aussi les coaches. Dire que je croyais qu’il n’y avait que les joueurs qui étaient stressé, j’étais drôlement dans le champ gauche, au Lycée. Vous voulez savoir pourquoi c’est stressant pour un coach, les soirs de match? Premièrement, il y a toute la pression des joueurs. Ça paraît peut-être con, dit comme ça, mais imaginez que vous êtes dans une équipe de football et que vous perdez un match hyper important. Qui allez-vous blâmer? Les spectateurs ou le coach? Honnêtement, c’est assez malpoli d’en vouloir aux spectateurs : ils n’ont rien fait. Par contre, qui coach l’équipe? Qui décide qui joue? Qui décide tout? Le coach. Et qui aide le coach? L’assistant coach, donc moi. Et qui le coach blâmera-t-il? Son assistant, non? Quoi que, il pourrait tout aussi bien blâmer l’équipe au complet, mais on en parlera plus tard. Bref, c’est aussi stressant pour les joueurs que pour le coach, voir même plus stressant pour moi, l’assistant coach. Moi qui, pourtant, n’a pas de mal à m’endormir, voilà que je n’ai réussi à m’endormir qu’à 03h du mat’. Brillant, très brillant, Jay!
   Ça y’est, la journée termine, le soir arrive. Le match approche et me voilà tellement stressé que j’ai du mal à me concentrer sur la route. Bon, j’exagère à peine. Ce qu’il me reste à faire avant le match : retourner à l’appart, prendre une bonne douche froide, manger un peu (si j’en suis capable) et revenir à l’école au plus tard 17h. J’ai une heure devant moi, ça devrait être bon. Douche prise, je sors tout propre de l’appart, un sandwich à la main. J’ai tout le temps de la manger en direction de l’école. Le match est à 18h30. Arrivé au terrain de football, je rejoins le coach et l’équipe qui sont tous prêts à jouer. Je suis si en retard que ça? Puis, le match débute. Mon stresse augmente et pourtant, ce n’est même pas moi qui joue. Le coach me demande d’aller chercher des gourdes d’eau dans son bureau, j’accepte, me disant que ça m’aiderait à décompresser. En direction vers la salle des profs, je remarque une salle de classe allumée. Étrange, l’école est supposée être fermée, même si c’est soir de match. Tout le monde devrait être au match à encourager l’école. J’entre dans la classe et une blondinette sursaute en me voyant. Un appareil photo à la main. « Tu n’es pas au match? On a besoin de photographe pour immortaliser ce moment! Je te jure, faut pas manquer ça! »
   
   

Tu ne devrais pas être au match ?

Jay &' Maëlle

Personne ne le devinerait quand on nous voit dans les couloirs du lycée mais pourtant être invisible est parfois un véritable atout. Je sais que mon absence de ce soir ne serait remarquée que par ma soeur qui croira sans difficulté que je n'avais pas envie de voir le match et que je suis aller à la salle de jeux. Tout le monde se moque que je sois présente ou non, tout comme une partie de moi se moque de savoir qui a gagné et qui a perdu. Même en perdant, les sportifs restent les rois du lycée, les maitres de notre petit monde alors le résultat du match, ce n'est qu'un chiffre finalement. Je me concentrais sur mes photos et comme à chaque fois que je faisais quelques choses qui touchait ma passion, je me perdis dans mes pensées durant quelques minutes. La réalité me rattrapa quand je sentis une présence qui me fit sursauté, la maladroite que je suis à alors pratiquement lacher l'appareil photo qu'elle avait en main avant de le rattraper au vol et de le poser sur le bureau. Je laissais échapper un petit soupire de soulagement, ce n'était pas un prof alors j'évitais l'heure de colle même si bien rapidement, je remarqua que ce n'était pas non plus un élève, mais bien l'assistant du coach, Jay, je crois. Finalement, je ne sais pas vraiment quels sont ses pouvoirs mais je crains le pire. Je baissant un peu le regard comme une petite fille en train de faire une bêtise avant de le regarder et de lui sourire. « non.. je devais finir le projet sur la compétition de natation de la semaine dernière. Mais ne vous inquiétez pas, il y a bien un photographe pour le match, Matt s'en occupe. » ajoutais-je rapidement pour me rattraper. Puis je pris une inspiration et décida de me lancer. « je suppose que je vais avoir des ennuis pour être ici ? »

Tu ignores le vide devant toi, les vertiges et la peur tu connais pas... Seule au milieu des loups, tu t'enfonces au bord des précipices. Dans la cité perdue, au travers de la nuit, toi tu vas bien. En travers la douleur et la mélancolie, tout ira bien. 'Maëlle & Jay
 
 

Comme je n’ai aucune envie d’être le prof chiant de l’école, je décide de ne pas gronder la blondinette. Elle ne fait rien de mal! Je ne la vois pas en train de voler des réponses d’examen, ni en train de vandaliser une classe! Et puis dans un sens, je la trouve ingénieuse d’être venue un soir de match. Elle a l’école à elle seule, si elle cherche la tranquillité, elle peut l’avoir. C’est sûr que si un autre prof arrive, il se pourrait que j’élève un peu ma voix et que je lui dise de retourner au match, mais ce n’est pas mon intention. En m’entendant arriver, elle sursauta si fort qu’elle en échappa son appareil photo. Heureusement, elle réussit à l’attraper avant qu’il ne fracasse le sol. Ouf, vous l’avez bien dit! Vous me voyez en train de supplier à genoux pour m’excuser? Ça vaut cher un appareil comme ça! Et comme je suis de nature gentil, je me serais obligé à lui payer les réparations, même s’il le faut un nouvel appareil photo. Mais, ça n’arrivera pas. « Oh, c’était la semaine dernière? Dommage, j’aurais bien voulu y assister! Ça s’est bien passé? Et en passant, tu peux me tutoyer, je suis peut-être considéré comme un " enseignant ", mais je ne suis pas si vieux, tu sais! » J’en profite pour dire le mot enseignant entre guillemets, parce qu’à mes yeux je n’en suis pas tellement un. Oui, je travaille à l’école, mais je ne suis qu’assistant. Je n’irais pas coller des retenues à qui en veut ou qui n’en veut pas. « Des ennuis? T’en fais pas, tu n’en auras pas. À moins que le coach n’arrive ou n’importe quel autre adulte n’arrive, tu es saine et sauve. » Puis, en l’observant, son visage me rappelle soudain une personne, même deux. « Hey, tu ne serais pas une des triplettes Morgan? » Il n’y a pas beaucoup de jumeaux à l’école, encore moins des triplées. Donc quand on en croise, on les reconnaît. Ce n’est certainement pas Charlie, car je viens de la voir sur le terrain avec la troupe de Cheerleaders.